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Energie renouvelable

Thierry Clairefond consomme de l'électricité qu'il produit

Thierry Clairefond produit de l'électricité avec des trackers solaires. Un moyen de réduire sa facture EDF et la satisfaction de fabriquer de l'énergie « verte ».
Thierry Clairefond consomme de l'électricité qu'il produit

A Chatuzange-le-Goubet, Thierry Clairefond cultive 70 hectares de céréales. Et il élève des poulets de chair (deux bandes de 70 000 par an) ainsi que des dindes (deux bandes de 22 500 par an) dans deux bâtiments avicoles (construits en 2012 et 2016) mais aussi des veaux de boucherie (160 places). En 2017, le bond des factures d'EDF (1 500 à 2 000 euros par mois) l'a fait réfléchir. De là lui est venue l'idée de produire sa propre électricité et de l'autoconsommer car « c'est l'avenir », le soleil étant une source d'énergie écologique et gratuite. Il s'est alors renseigné. Son projet est arrivé aux oreilles de la société OKWind, qui l'a contacté. Elle a réalisé un diagnostic énergétique (étude de consommation avec mesures pour dimensionner l'installation), des simulations de production... et lui a fait une proposition.

Thierry Clairefond, agriculteur à Chatuzange-le-Goubet.

Deux trackers photovoltaïques

Au début de cette année, deux trackers photovoltaïques de 75 m2 de cellules chacun ont été installés à proximité des trois bâtiments d'élevage de Thierry Clairefond. « Il n'y a pas besoin de permis de construire, juste d'une déclaration préalable, explique-t-il. Les travaux ont eu lieu en février et la mise en route en mars. » L'investissement s'élève à 38 000 euros par tracker, pose comprise (hors génie civil : de l'ordre de 1 200 euros). Et le montage dure trois à quatre jours.
Le 4 juin, une porte ouverte a été organisée sur le site de cette installation de trackers OkWind - « la première dans la Drôme », signale Romain Vernette, technico-commercial au sein de cette société. Une autre est en cours à Livron (pour une station de conditionnement de fruits). Et une autre est en projet (non encore validée par l'administration) en Drôme des collines.

Le biomimétisme du tournesol

Les panneaux de ces trackers solaires s'orientent verticalement et horizontalement.

Le fonctionnement des trackers photovoltaïques (ou solaires) s'inspire du tournesol en croissance : comme lui, ils cherchent le rayonnement maximum en restant perpendiculaires aux rayons du soleil. Les panneaux s'orientent verticalement et horizontalement (bi-axes). Ainsi, par rapport à des installations fixes, la production est supérieure de 40 à 50 %. En outre, les panneaux sont équipés de cellules bifaces : la face arrière capte aussi la lumière réfléchie et diffuse pour générer de l'électricité. Avec ces cellules, les modules peuvent produire 10 à 30 % d'énergie de plus que les cellules monofaces, selon OKWind. Au total, grâce à la mobilité des panneaux associée aux cellules bifaces, le gain de production peut atteindre 70 %, comparé à une installation fixe de puissance équivalente. Et la production est mieux répartie sur la journée (pas de pointes).

Plus productif qu'un panneau fixe

Autres avantages mis en avant par l'entreprise sur le plan technique : le tracker étant sur un mât (de faible emprise au sol et différentes hauteurs possibles), ses cellules sont mieux ventilées, d'où moins de pertes. Car, à savoir, au-dessus de 25°C, la production d'électricité diminue de 0,5 % chaque fois que la température des panneaux augmente de 1°C. A noter également, par sécurité, le tracker se met automatiquement à plat en cas de fortes rafales de vent (à partir de 45 km/heure), grâce à un anémomètre. Il peut également être placé manuellement dans cette position. Et il s'y met toutes les nuits. Ainsi, la rosée ou pluie se déposant dessus le nettoie lorsqu'elle glisse le matin. A signaler encore, production et consommation peuvent être suivies à tout moment depuis un ordinateur ou smartphone à l'aide d'un logiciel. Sur le plan économique, l'autoproduction évite les hausses du coût du kilowattheure. OKWind donne une durée de vie de minimum 25 ans pour ses trackers. Et ils sont 100 % recyclables (acier, aluminum, verre, semi-conducteurs).

35 à 40 % d'économie

Consommation d'électricité de l'exploitation de Thierry Clairefond le 2 juin (journée ensoleillée) dont celle produite avec ses trackers photovoltaïques (en vert).

Thierry Clairefond utilise l'électricité produite par ses deux trackers solaires dans ses bâtiments avicoles (chaîne d'alimentation des volailles, éclairage, ventilation, brumisation), celui des veaux (préchauffage de l'eau, ventilation, lumière) ainsi que pour faire fonctionner la pompe d'arrosage des cultures et divers autres usages. En illustration, un exemple : la courbe de consommation d'électricité de son exploitation le 2 juin (journée ensoleillée) dont celle produite avec ses trackers photovoltaïques (en vert).
Même s'il a encore peu de recul, Thierry Clairefond se dit satisfait. Il estime avoir fait une économie de 35 à 40 % en mai par rapport à sa consommation habituelle d'électricité (EDF). « Le but du jeu est de la réduire le plus possible, de rembourser le crédit bancaire avec l'économie réalisée, précise-t-il. Au plus le tarif d'EDF augmentera, au plus mon installation sera rentable. Pour l'électricité que je produis, je ne suis pas tributaire des hausses de prix. En plus, c'est de l'énergie verte, qui ne pollue pas et qui donne à l'agriculture une image moderne. » Thierry Clairefond espère qu'un jour le stockage en batteries de cette énergie renouvelable sera possible. Concernant le surplus de production, Jérôme Heulot, responsable commercial chez OKWind, indique qu'un contrat est en cours de finalisation avec une régie pour le rachat à 5,5 ou 6 centimes du kilowattheure. « C'est, dit-il, en bonne voie. »

Annie Laurie

OKWind et ses trackers solaires

Les panneaux des trackers photovoltaïques OKWind sont équipés de cellules bifaces : la face arrière (photo) capte aussi la lumière pour générer de l'électricité.
OKWind est un fabricant français de générateurs à énergies renouvelables. Basée à Vitré (Ille-et-Vilaine), cette société a été créée en 2009 par Louis Maurice et Daniel Heulot. Aujourd'hui, elle est en plein développement. Elle emploie une cinquantaine de salariés (près de 70 fin 2019) et a réalisé un chiffre d'affaires de 9,4 millions d'euros en 2018 (prévision de 15 millions en 2019) contre 900 000 euros en 2015.
95 % des ventes dans l'agricole
OKWind a posé son premier tracker photovoltaïque en 2013. Depuis, elle en a commercialisé autour de 650 en France (deux dimensions disponibles : panneaux de 75 ou 117 m2 de cellules), dont 95 % auprès du monde agricole : 50 % dans des exploitations avec élevage de porcs (Grand-Ouest), 30 % avec élevage de volailles (principalement de poules pondeuses), 15 % avec élevage de vaches laitières (équipés de robots de traite), ainsi que 5 % dans les secteurs industriel et tertiaire. Benoît Pineau, chargé des marchés agricoles et export au sein d'OKWind, signale aussi des premiers marchés, très récents, à l'étranger (en Afrique).