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Équipement

Ce designer drômois rhabille les métiers agricoles 

Jean-Baptiste Martin, designer indépendant, est en résidence jusqu’au 11 juillet dans une ferme drômoise pour concevoir des prototypes de vêtements dédiés aux métiers agricoles.

Ce designer drômois rhabille les métiers agricoles 
©JBMartin
En 2024, le designer avait collaboré avec un maraîcher drômois pour concevoir une veste adaptée au métier.

Installé depuis 2019 dans la Drôme, Jean-Baptiste Martin a multiplié les projets liés au design de vêtements techniques dédiés notamment aux activités sportives. Toutefois, après plusieurs échanges sur le marché avec des agriculteurs, l’idée de « travailler sur des choses utiles pour un métier essentiel », a fait son chemin. Pour la deuxième année consécutive, le créateur s’est lancé dans un projet de vêtements dédiés et conçus pour les métiers agricoles. Le trentenaire a donc rejoint la ferme des Volonteux, à Beaumont-lès-Valence, début mai pour une résidence jusqu’au 11 juillet. Il a nommé son projet « Workwear Design Lab », un laboratoire de design sur le vêtement de travail. Objectif : créer trois ensembles, un pour les arboriculteurs, un pour les maraîchers et un pour les boulangers. 

Local et artisanal 

Avant d’arriver dans la Drôme, le designer vivait en Bretagne. Le gros de son expérience dans le secteur textile, il l’a acquise durant plusieurs années dans l’agence de mode Grand studio, basée à Zurich en Suisse, spécialisée dans les vêtements de sport. Depuis son installation dans la Drôme, le trentenaire enseigne le design de mode au lycée André Argouges à Grenoble. En parallèle, il travaille aussi avec la métropole de Lyon et des collégiens sur un projet d’initiation au design et à la transformation d’uniformes d’agents de la collectivité pour créer des vêtements appropriés à la mobilité douce. C’est donc en parallèle de ces activités que Jean-Baptiste Martin a monté son projet de recherche personnel. « J’ai constaté que dans certains milieux professionnels, les vêtements spécialisés étaient conçus en série, de manière industrielle, à l’autre bout du monde, avec des matières parfois assez chimiques, rapporte le designer. L’idée serait de proposer des vêtements professionnels conçus de manière plus artisanale et adaptés aux différentes activités ».


Après s’être renseigné sur la tenue des maraîchers, le Breton a observé que « peu de vêtements étaient bien adaptés. Souvent, ils mixent des habits sportifs et de chantier. Il existe des marques dédiées mais elles proposent des vêtements assez chers ou de production lointaine. J’ai souhaité apporter une alternative ». Les prototypes que le designer s’apprête à réaliser se composeront de matières principalement issues de la récupération. Une partie vient de la Vieille usine à Romans-sur-Isère, véritable « caverne d’Ali-Baba ». « On y déniche des matériaux plus techniques comme le Gore-Tex qui possède des membranes imperméables et transpirantes ou des élastiques pour la liberté de mouvements », précise le passionné. Pour coller avec sa démarche artisanale, Jean-Baptiste Martin souhaite partir d’une base de matériaux plus naturels et locaux tels que le chanvre, le lin ou encore le coton. 

Des vêtements adaptés 

Avec cette résidence, le designer n’en est pas à son coup d’essai. En 2024, il avait collaboré avec un maraîcher drômois pour concevoir une veste adaptée au métier. « C’était un vêtement modulable. L’agriculteur m’avait indiqué que lors de la récolte des courgettes, les avant-bras pouvaient s’irriter. J’ai donc conçu des gants longs zippés aux manches et qui pouvaient s’enlever facilement », détaille le créateur. Des retours nécessaires au professionnel qui compte sur les Volonteux pour approfondir son travail de création. « Nous achetons parfois des vêtements spécialisés mais ils viennent de pays lointains. C’est sûr que ça serait bien d’avoir plus de local ou que nous puissions recycler ce que nous avons plutôt que d’acheter du neuf. Nous avons toujours travaillé comme ça, nous nous habituons aux petits inconforts, par exemple lorsque nous sommes en short avec les genoux par terre… Même si nous savons que tous ces petits détails contribuent à la fatigue générale. Avoir plus de confort au travail, c’est forcément un plus », témoigne Sylvain Berry, maraîcher à la ferme. 

 ©Workwear Design LabCaption

 

Conception collaborative 

La veste prototype créée l’année dernière avait été exposée durant la Design Week de Valence en septembre. « J’ai eu de supers retours, notamment de viticulteurs qui étaient intéressés par la démarche », se rappelle Jean-Baptiste Martin. Ainsi, il a mûri son projet et, à travers la résidence au sein des Volonteux, souhaite faire évoluer son premier prototype. « Je me suis inspiré du modèle de l’Atelier paysan qui produit des plans de machines agricoles et les partage sur internet afin que les agriculteurs puissent concevoir eux-mêmes leurs outils. C’est une manière de proposer un autre mode de distribution et une alternative aux grosses entreprises », estime le designer. Ce dernier veut se rapprocher de la culture fab lab, ces tiers-lieux de fabrication coopératifs. « Je souhaite co-créer les prototypes avec les agriculteurs et les différents métiers avec des échanges et des tests. La finalité n’est pas de produire en série ou de commercialiser mais plutôt de partager mes patronages au plus grand nombre », déclare le créateur. 
Cette démarche impose certaines contraintes de conception : des outils simples et accessibles (machine à coudre, surjeteuse, machine à pression et découpe laser) et des matières faciles à trouver localement. Jean-Baptiste Martin utilise un logiciel 3D pour transformer son patronage en modélisation 3D. Cela permet d’adapter le vêtement aux morphologies et d’intégrer des accessoires et des détails. Au-delà de l’objectif de concevoir trois panoplies adaptées aux métiers, le professionnel anime des ateliers ouverts au public à la ferme. Le second aura lieu le 18 juin sur inscription. Les participants créeront un chapeau de maraîchage de style saharienne pour couvrir la nuque. À la fin de sa résidence, le designer pourrait de nouveau exposer son travail lors de la Design week à Valence ou même proposer des collaborations avec certaines marques spécialisées.   
M.E. 

Atelier de confection du 25 juin ouvert sur inscription par email : contact@jeanbaptistemartin.design

Jean-Baptiste Martin mène son projet « Workwear Design Lab » à la ferme des Volonteux avec l’appui d’un stagiaire. ©ME_AD26

 

Vêtements de travail du secteur agricole 

Un marché en croissance soutenue


Le marché mondial des vêtements de travail pour le secteur agricole était évalué à 12,5 milliards de dollars en 2023 et devrait atteindre 18,8 milliards d’ici 2031, avec un taux de croissance annuel composé (TCAC) de 4,9 % entre 2024 et 2031. 
En France, le marché des vêtements de travail pour l’agriculture connaît une croissance soutenue, bien que le chiffre d’affaires ait diminué de 3,2 % en 2024, après une augmentation de 8,2 % en 2023. Ce marché devrait continuer à croître, soutenu par des réglementations de sécurité de plus en plus strictes, une prise de conscience accrue de l’importance de la sécurité au travail et une demande croissante pour des produits durables et technologiquement avancés.
Les produits les plus populaires sont les combinaisons agricoles, les vêtements grand froid ainsi que les équipements de protection individuelle (EPI).
Les consommateurs privilégient de plus en plus les vêtements fabriqués à partir de matériaux respectueux de l’environnement, tels que le coton biologique et le polyester recyclé. L’intégration de technologies avancées (comme les tissus respirants et résistants aux intempéries) améliore le confort et la sécurité des travailleurs agricoles.
À noter, la demande pour des vêtements de travail personnalisés, adaptés aux besoins spécifiques des agriculteurs, progresse.