Accès au contenu
Filière brassicole

A vos malts ! Prêts ? Partez...

Permettre aux brasseries et distilleries locales de s’approvisionner en malt bio local ? C’est le défi que s’est lancé Tiphaine et Jean Girardeau, gérants de la micro-malterie A vos Malts à Granges-lès-Beaumont.

A vos malts ! Prêts ? Partez...
« L’orge brassicole biologique est un produit à forte valeur ajoutée. De plus, il présente de nombreux intérêts dans la rotation des cultures et ne nécessite pas d’irrigation », indiquent Tiphaine et Jean Girardeau, gérants de la malterie A vos malts basée à Granges-lès-Beaumont.

« A vos malts ! Prêts ? Brassez ! ». A l’image d’un slogan bien connu, la malterie A vos Malts entend aller de l’avant. Toute jeune entreprise créée en juin 2020 à Granges-Les-Beaumont, la micro-malterie A vos malts a déjà tout d’une grande. A sa tête, Tiphaine et Jean Girardeau. Elle, sensible aux produits locaux et aux circuits courts, gérait un réseau de La Ruche qui dit oui. Lui, ingénieur de formation, était brasseur depuis 2012. Au fil de ses aventures professionnelles, le couple se rend compte que la majorité des bières biologiques locales se fait à partir de malt importé. En réalité, une grosse partie du marché du malt se trouve à l’étranger, principalement en Belgique et en Allemagne, où les prix sont généralement 50 % moins élevés. « Cela nous posait problème. Nous portions tous deux haut et fort l’intérêt des circuits courts, du produit local, sans avoir la possibilité de s’approvisionner à 100 % en malt français. Aujourd’hui, les brasseries n’utilisent que 10 à 15 % de malt local », regrette-t-il. 
Face à ce constat, l’envie d’aller plus loin se fait sentir. Avant de se lancer dans la création d’un site de production, le couple a longuement étudié la faisabilité du projet. Ils se sont renseignés sur les micro-malteries existantes en France, avant de s’envoler pour les Etats-Unis. « Ils ont cinq ans d’avance sur le marché de la bière artisanale », explique l’entrepreneur. Mieux encore, les Américains disposent d’une technologie intéressante : une malterie à tambour, un procédé inconnu en France, qui assure une qualité incontestable au malt.

Un procédé innovant

Depuis janvier, 250 tonnes de céréales ont été traitées à la malterie A vos Malts ( Crédit « A vos Malts »)

Après avoir réuni toutes ses économies dans ce projet - plus d’un million d’euros d’investissement -, le couple est devenu locataire d’un bâtiment de près de 2 000 m² à Granges-lès-Beaumont en juin 2020. Il reçoit la cuve en inox de 18 tonnes - aux normes agroalimentaires -, pouvant accueillir jusqu’à 10 tonnes de céréales. L’aventure commence réellement en janvier 2021, avec la première mise en service de ce tambour géant, permettant de réaliser les étapes délicates du processus de maltage : la germination et le touraillage. « Depuis le démarrage, nous avons traité plus de 250 tonnes de céréales, soit une production de 200 tonnes de malt », se réjouit Jean Girardeau. Aujourd’hui, le chef d’entreprise travaille avec une trentaine de brasseries. « Il y en a autant sur liste d’attente ! ». 
Pour cette première année, une trentaine d’agriculteurs bio lui a fait confiance. Mais ce n’est pas suffisant pour répondre à la demande et rendre l’entreprise rentable. « L’orge brassicole biologique est un produit à forte valeur ajoutée. De plus, il présente de nombreux intérêts dans la rotation des cultures et ne nécessite pas d’irrigation », indique-t-il. L’entreprise lance ainsi un appel aux agriculteurs désireux de s’engager dans une filière qui ne demande qu’à se développer. « Nous recherchons 700 tonnes d'orge pour l'été prochain, en priorité d'Auvergne-Rhône-Alpes, mais aussi de Provence-Alpes-Côte d'Azur et Bourgogne-Franche-Comté », annonce Jean Girardeau.

Devenir une référence en la matière

 La malterie est équipée d’une cuve en inox de 18 tonnes, pouvant accueillir jusqu’à 10 tonnes de céréales. D’ici février 2022, les gérants souhaitent installer deux tambours supplémentaires. Crédit « A vos Malts »

Un cahier des charges a été établi à destination des producteurs. Il s'appuie sur les recommandations du syndicat Malteurs de France et porte notamment sur le calibre, le taux de protéines, la pureté variétale et la qualité sanitaire. Devenir une référence auprès des brasseurs locaux, c’est le défi porté par les co-gérants. « Avec 340 brasseurs en Auvergne-Rhône-Alpes, le marché est de 8 000 tonnes de malt par an, voire 15 000 tonnes si on inclut les brasseurs de Provence-Alpes-Côte-d'Azur et de Bourgogne-Franche-Comté ». Pour se démarquer, A vos Malts s’est également équipé d’un matériel de torréfaction, contrôlé par logiciel, avec une table de refroidissement permettant de saisir les arômes et les couleurs. « Cela nous permet de diversifier notre offre et de proposer une gamme de plus de vingt malts spéciaux, pour des bières inédites », explique Jean Girardeau. L’entreprise détient également un laboratoire d’analyse et une salle de dégustation pour les clients. Lancé dans cette belle aventure, les entrepreneurs souhaitent un développement rapide de leur activité. « Notre projet est d’installer dès février 2022 deux tambours supplémentaires ainsi que des silos de stockage ». Leurs locaux sont dimensionnés pour installer, à terme, cinq tambours. Ils pourraient alors travailler chaque année 3 000 tonnes d'orge biologique et contribuer à la pérennité de la filière durable d’orge brassicole régionale.

Amandine Priolet

Aujourd’hui, les brasseries n’utilisent que 10 à 15 % de malt local. Crédit « A vos Malts »