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Droit rural

Après un sinistre climatique, qui doit payer  les réparations ?

Après un orage par exemple, quels dommages seront à la charge du bailleur et quels autres à celle du fermier ? Explications.

Après un sinistre climatique, qui doit payer  les réparations ?
© Archives AD

Question : Suite aux violents orages, de nombreux dégâts ont été constatés sur les terres agricoles. Il peut s’agir de dégâts mineurs que l’exploitant répare souvent sans demander l’intervention du propriétaire. Toutefois, en raison de la violence des orages du mois de juin, les dégâts peuvent être très importants et l’exploitant ne peut y faire face tout seul. Surtout, quand le coût des travaux est si important et que les indemnités versées au titre des calamités agricoles ne couvrent qu’une petite partie des frais.
Il se pose alors la question de qui doit prendre en charge financièrement le coût des réparations ?

Réponse : Le bailleur a l’obligation d’entretenir le bien en état de servir à l’usage pour lequel il a été loué et de faire, « pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que locatives ». Cette double obligation d’entretenir et de réparer que le droit commun met à la charge du propriétaire est renforcée par le statut du fermage. L’article L.415-3 du code rural stipule, en effet, que le paiement des grosses réparations est à la charge exclusive du propriétaire et l’article L.411-12 ajoute que le fermage ne peut comprendre, en sus du prix, aucune redevance ou service. En vertu de ces dispositions, la clause du bail qui met à la charge du preneur l’obligation d’effectuer les grosses réparations est illicite.
L’article 606 du code civil définit les grosses réparations comme étant celles afférentes aux gros murs, aux voûtes, au rétablissement des poutres, des couvertures entières, des digues, des murs de soutènement et des clôtures.
Il n’y a pas lieu de distinguer entre grosses réparations et réparations locatives ou de menu entretien lorsqu’elles sont occasionnées par vétusté, force majeure, vice de construction ou de la matière. Dans ces hypothèses, elles sont toutes dues par le bailleur.

Comme tout locataire, le fermier est tenu d’entretenir le fonds loué. Mais le statut des baux ruraux limite impérativement l’obligation du preneur aux seules réparations locatives ou de menu entretien qui ne sont pas dues à la vétusté, à la force majeure ou au vice de construction de la matière. Exceptionnellement, des réparations de gros entretien peuvent être mises à la charge du preneur si elles sont dues à un défaut d’entretien.

Les orages peuvent être considérés comme force majeur. En effet, la force majeure se caractérise par l’irrésistibilité et l’imprévisibilité de l’évènement. Vu l’intensité et l’ampleur des orages, ces deux critères devraient être rempli. Ainsi, les dégâts ne serraient pas à la charge du fermier.
Toutefois, si on ne peut pas retenir la force majeure, les travaux de remise en état d’une digue et des mûrs de soutènement relève de la responsabilité du bailleur conformément à l’article 606 du code civil.

Si on regarde la jurisprudence sur le sujet, il convient d’être plus prudent. En effet, la jurisprudence a mis à la charge du bailleur l’enlèvement des arbres arrachés par une tempête. Or, la remise en état des clôtures écrasées par les arbres arrachés par une tempête a été considérée comme obligation d’entretien à la charge du fermier. La Cour de cassation n’a donc pas retenu la force majeure pour le cas spécifique qu’elle devait juger.

Cet exemple montre à quel point il est incertain quels dommages seront mis à la charge du bailleur et quels aux fermiers. Les tribunaux jugent au cas par cas et il est difficile de dégager des principes généraux.
Il est donc fortement conseillé de trouver des accords entre les deux parties en dehors de toute procédure judiciaire et en fonction des moyens de chacun. n

Le service juridique rural de la FDSEA 26, Nathalie Kotomski