Assurance récolte : « C'est du cas par cas »
Le nouveau dispositif de gestion des risques climatiques est en place. Chaque agriculteur doit désormais choisir de s'assurer ou pas. Un choix individuel à arbitrer rapidement car chaque exploitation est un cas particulier.

Le régime des calamités agricoles, avec ses missions d'enquête et son processus de reconnaissance et d'indemnisations des pertes, appartient au passé. Depuis le 1er janvier, il est remplacé par un nouveau système de gestion des risques climatiques dont l’objectif est de généraliser l’assurance multirisque climatique (MRC), sans obligation mais par l’incitation. D’une part en amenant une baisse des coûts de l’assurance (grâce à un taux de subvention de 70 % sur la base d’une franchise à 20 % de perte) ; d’autre part en la rendant accessible à toutes les filières agricoles (voir pages suivantes).
« Une réforme très profonde »
« C'est une réforme très profonde et c'est le moment de se renseigner au maximum sur l'assurance récolte, même pour celles et ceux qui ont des a priori défavorables », conseille Bruno Darnaud, membre de la FDSEA, élu chambre d'agriculture et président de l'AOP pêches et abricots de France. Lors d'une réunion organisée le 5 janvier à Valence par la FDSEA de la Drôme, en présence de conseillères du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes, il a mis l'accent sur la baisse du coût de l'assurance et rappelé la succession des sinistres climatiques ces dernières années. Des sinistres qui touchent désormais l'ensemble du pays chaque saison. D'après une étude lancée par les assureurs, d'ici à 2030 les sécheresses devraient augmenter de 10 %, les inondations de 15 % et les tempêtes localisées de 10 %. « La sécurisation des exploitations devient essentielle », estiment les conseillères du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes.
La moyenne olympique, véritable frein
Pour les arboriculteurs et les viticulteurs, choisir de s'assurer passe nécessairement par une étude approfondie. Car si le système semble simple, en réalité il ne l'est pas tant que ça. Première difficulté, la moyenne olympique (ou triennale) qui servira à fixer les rendements des surfaces assurées, espèce par espèce. Pour une exploitation ayant subi plusieurs sinistres climatiques successifs ces dernières années, ce qui est le cas en Drôme, cela conduit à s'assurer avec des rendements très bas, ce qui limite fortement l'intérêt de l'assurance. Cette moyenne olympique est un vrai frein à l'efficience assurantielle, reconnaissent des responsables agricoles. Mais ce système est contraint par les accords de Marrakech signés en 1994 dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), afin de ne pas fausser la concurrence dès lors qu'il y a des subventions publiques, ce qui est le cas avec l'assurance récolte. En cas de rendements de référence bas après plusieurs accidents climatiques, il est toujours possible d’opter pour une franchise basse ou d’assurer un prix plus élevé, mais cela a bien sûr un coût.
Choisir le bon prix et le bon rendement à assurer
Autre difficulté, les barèmes de prix fixés espèce par espèce. Pour calculer le capital assuré, la fourchette peut varier de 60 % à 120 % du prix du barème. « Il est toujours possible de s'assurer sur ses prix bord de champ, expliquent les conseillères. Mais cela fait baisser le taux de la subvention à l'assurance, ce qui aboutit à une cotisation plus élevée. » À noter : au grand dam de la FNSEA, les coûts de production ne sont pas inclus dans les barèmes de prix. Selon la centrale syndicale, « un engagement est pris par le ministère pour revoir le dispositif dans le courant de l'année ». Dans l'immédiat, il faut faire avec les barèmes en vigueur.
Choisir le bon prix et le bon rendement à assurer est donc essentiel. Bien d'autres questions se posent en arboriculture et viticulture. Quid des surfaces déjà protégées (présence de filets paragrêle, de dispositifs anti-gel…) ? Quid des manquants dans les vergers ? Quid des jeunes plantations, des pertes de qualité ? Etc.
« Faire établir des devis »
Néanmoins, « pour ceux qui s'assurent, c'est assez clair de faire les calculs, confie Bruno Darnaud. En revanche, pour les non-assurés, la situation est devenue floue » depuis la décision du ministre de l'Agriculture de reporter d'un an l’obligation de choisir un interlocuteur unique. Difficile de savoir à ce jour comment les services de l’État vont effectuer les calculs d'indemnisation chez les non-assurés éligibles au Fonds de solidarité nationale (FSN).
« Tout le monde n’est pas obligé de s’assurer mais il est indispensable d’aller se renseigner et de faire établir des devis », insiste Bruno Darnaud. Il peut même être utile de se poser la question d'opter ou non pour une assurance grêle spécifique. Ou encore de s'assurer à minima (franchise et prix)… « Il n'y a pas de solution unique, poursuit-il, c'est du cas par cas. Il ne faut plus tarder pour se positionner dans ses choix. »
Christophe Ledoux