La cession du bail rural (Art. L 411-35 code rural)
La cession faite sans autorisation préalable est une cession prohibée et elle est sanctionnée par la nullité de l’acte. Explication.

Question : Mon père, agriculteur depuis toujours, est proche de la retraite. Je souhaite reprendre son exploitation en tant que jeune agriculteur. Dans le cadre de cette reprise, on m’a dit que je dois procéder à la cession des baux ruraux de mon père à moi-même. Qu’en est-il et comment doit-on procéder ?
Réponse : L’article L. 411-35 du code rural interdit toute cession du bail, « sauf si la cession est consentie, avec l’agrément du bailleur, au profit du conjoint ou du partenaire d’un pacte civil de solidarité du preneur participant à l’exploitation ou aux descendants du preneur ».
En plus de la dérogation au bénéfice des descendants et du conjoint, ce principe de prohibition connaît la cessibilité hors cadre familiale : le bail cessible. Les parties doivent, par exemple, choisir expressément cette modalité de bail qui n’est ouverte qu’aux nouveaux baux. En l’espèce, il s’agit d’une transmission à un descendant et la réponse donnée se limitera à ce cas de figure bien précis.
Le preneur peut céder son bail jusqu’à la date d’expiration du bail. Notez que la cession peut aussi être faite au profit des petits-enfants du preneur. En revanche, le gendre du preneur, n’étant pas un descendant, ne peut pas bénéficier du bail. Si plusieurs descendants souhaitent reprendre le bail, les termes de l’article L. 411-35 ne s’y opposent pas.
La cession doit être faite avec l’agrément du bailleur, qui peut être tacite, sous réserve d’une manifestation claire et non équivoque de volonté.
Il est donc indispensable d’obtenir une autorisation préalable écrite du bailleur, qui identifie le bail objet de la cession et précise la date de cession ; cet écrit sera signé par le preneur sortant (le père), le preneur entrant (le fils) et le bailleur (le propriétaire).
Toutefois, si le bailleur refuse de donner son accord à la cession, celle-ci peut être autorisée par le tribunal paritaire des baux ruraux. Les juges doivent rechercher si la cession ne risque pas de nuire aux intérêts légitimes du bailleur. En revanche, les projets personnels du bailleur d’exploitation ou d’installation, l’importance respective des terres du preneur et du bailleur, n’entrent absolument pas en ligne de compte.
Dans la décision du tribunal, il y a seulement deux considérations qui interviennent : la qualité du cessionnaire (preneur entrant) et le comportement du preneur (preneur sortant) :
- qualité du cessionnaire : peut-il assurer une bonne exploitation du fonds, a-t-il la compétence professionnelle et, le cas échéant, les autorisations d’exploiter…
- comportement du preneur : est-il de bonne foi ? En effet, la jurisprudence considère que la faculté de céder le bail est une faveur réservée au fermier qui a respecté ses obligations découlant du bail.
La cession faite sans autorisation préalable est une cession prohibée et elle est sanctionnée par la nullité de l’acte. C’est-à-dire que le fils n’a pas remplacé son père dans le bail. On s’imagine les conséquences d’une telle solution : le père étant resté preneur du bail, il ne peut pas prendre sa retraite. De plus, la cession sans autorisation expresse constitue à elle seule un motif de résiliation du bail initial. Ainsi, une cession sans l’accord du propriétaire, peut avoir comme conséquence la résiliation du bail !
Afin d’être en règle avec les dispositions du code rural et d’éviter tout litige ultérieur avec les propriétaires, il est nécessaire de communiquer suffisamment tôt avec les bailleurs concernés par la transmission des baux afin d’obtenir leur accord écrit avant la cession ou, le cas échéant, l’accord du tribunal paritaire des baux ruraux.