Le bail à métayage

Question : Je suis exploitant agricole et essentiellement viticulteur. Un autre exploitant, dont les parcelles jouxtent les miennes, va prendre sa retraite à la fin de l'année et me propose de me louer une partie de ses biens par le biais d'un bail à métayage. Pourriez-vous me dire si ce type de contrat est toujours valable aujourd'hui ? Si oui, pourriez-vous m'indiquer les dispositions qui diffèrent entre un bail à métayage et un bail à ferme plus classique ?
Réponse : Le bail à métayage est la mise à disposition d'un fonds par le bailleur à un preneur, ce dernier s'engageant à le cultiver sous la condition d'en partager les produits avec le bailleur. Ce contrat est peu utilisé de nos jours en France mais subsiste dans les régions viticoles. Il a d'ailleurs pu garder des noms variés comme « bail à colonat partiaire » ou « vigneronnage ». Le métayage présente des avantages pour l'exploitant qui ne supporte pas seuls les investissements nécessaires à la mise en valeur du fonds et partage avec le bailleur les risques d'exploitation. Cependant, ce contrat suppose que les parties collaborent activement et souvent, le preneur redoute une baisse de son indépendance. De cet équilibre précaire découle le faible recours aux baux à métayage. Le statut du métayage est soumis au statut du fermage pour la formation du contrat, sa forme, sa preuve, sa durée, le droit au renouvellement, le droit de reprise du propriétaire, le droit de préemption, le droit à indemnité du preneur sortant et toutes les conditions de cession du bail. Ce sont les conditions de la rémunération et du mode de collaboration que les parties doivent entretenir qui permettent de distinguer le métayage d'autres baux.
Dans le bail à métayage, à la différence du bailleur à ferme, le bailleur peut intervenir dans la marche de l'exploitation. La surveillance des travaux par le propriétaire ne constitue qu'une simple faculté dont il ne peut user que si elle lui a été réservée par une clause expresse du bail. La mésentente ne constitue pas un motif spécifique de résiliation car il doit être établi que cette mésentente se traduise par des agissements compromettant la bonne exploitation du fonds. Dans le contrat de métayage, le bailleur reçoit une part des produits du domaine et contribue pour partie aux dépenses de l'exploitation. La vocation du bailleur à obtenir une part des fruits de l'exploitation légitime une certaine surveillance de sa part sur la marche de l'entreprise.
Le mode de rémunération du bailleur caractérise le métayage : il ne reçoit pas un loyer déterminé mais une part des fruits. L'article L. 417-3 du Code rural précise le montant de cette part : c'est la règle du tiercement. Le prix du bail ne peut être supérieur au tiers de l'ensemble des produits, sauf décision contraire du tribunal paritaire. Ce principe est d'ordre public. Simultanément, le bailleur et le métayer se partagent les frais d'exploitation. La règle du tiercement s'applique pour la répartition des dépenses comme pour les pertes de récolte par cas fortuit. Dans ce dernier cas, chacune des parties supporte la perte pour sa part. D'autres dépenses sont traditionnellement prises en charge par une seule des parties : les frais de main-d'œuvre incombent au métayer, les frais de réparation des bâtiments au bailleur.
Le métayage prend fin dans les mêmes cas et pour les mêmes causes que le fermage. Toutefois, pour tenir compte de la nature propre au métayage, des particularités se distinguent. Il existe ainsi une cause spécifique de résiliation du métayage ; il s'agit de la résiliation triennale prévue à l'article
L. 417-2 du code rural. Le bail peut en effet à la demande du seul preneur être résilié tous les trois ans sous réserve de la délivrance d'un congé dans les délais conformes aux usages locaux, lesquels sont généralement d'une année dans le département de la Drôme (usages recensés par la chambre d'agriculture). En outre, en cas de destruction partielle des biens loués et lorsque l'équilibre économique de l'exploitation est gravement compromis, la faculté de demander la résiliation appartient au preneur et au bailleur. Enfin, à la demande de chacune des parties, le bail à métayage peut être converti en un bail à ferme. Cette conversion est un acte grave puisqu'une partie peut se voir imposer une modification importante du contrat sans son accord. Il en résulte des conditions précises et strictes. Les parties sont libres de convertir à l'amiable le bail de métayage en fermage ; encore faudra-t-il en garder la preuve. Par ailleurs, cette conversion peut être demandée par le preneur au tribunal à partir de la troisième année dans des situations singulières. Elle peut enfin être demandée de plein droit après la huitième année de bail sans qu'il soit nécessaire de justifier d'aucun motif.
Les baux à métayage impliquent de fréquents rapports entre bailleur et preneur, la mésintelligence y est donc à redouter. Aucune règle de droit ne pourra imposer une franche sociabilité. Ce bail, avec ses caractéristiques précises, est donc à envisager avec discernement.
Le service juridique rural de la FDSEA 26,
Nathalie Kotomski