Le fermage est trop élevé : que faire ?
Si le montant du fermage ne respecte pas la règlementation, le code rural prévoit la possibilité de l’action en révision des fermages anormalement élevés.

Question : Je me suis installé récemment dans la région car j’ai pu reprendre l’exploitation d’un agriculteur qui a pris sa retraite. Les différents propriétaires ont bien voulu me refaire des baux ruraux. Toutefois, l’un d’entre eux m’a réclamé un fermage beaucoup plus important que celui que je paye aux autres propriétaires. Comme ces terres sont indispensables à mon exploitation, j’ai quand-même accepté les conditions du bail. Mais aujourd’hui je me pose la question si j’ai bien fait. Est-ce qu’il existe un moyen pour avoir le même prix chez tous les bailleurs ?
Réponse : La fixation du prix du bail est encadrée par la loi. En effet, le prix du bail est composé de plusieurs éléments calculés distinctement : le loyer des bâtiments d’habitation, le loyer des terres nues et des bâtiments d’exploitation et, le cas échéant, celui des terres portant des cultures pérennes. L’article L. 411-11 du code rural prévoit aussi que tous ces loyers doivent s’inscrire dans les limites maxima-minima prévues par l’arrêté préfectoral qui représentent les valeurs locatives des biens loués. La valeur locative des terres peut s’appuyer sur différents critères comme, par exemple, la facilité de travail du sol, sa nature, le régime des eaux, ou encore la structure de la parcelle ou son exposition. Le prix du bail peut ainsi varier d’un bailleur à un autre en fonction des parcelles louées. Il est évident qu’un ensemble de parcelles très morcelé et dispersé sur l’ensemble de la commune ne représente pas la même valeur pour un agriculteur qu’une grande parcelle d’un seul tenant avec un accès facile située proche de son exploitation. Donc, normalement le prix du bail devrait être très varié.
La réalité est souvent différente : le propriétaire a une idée bien précise du loyer et ne se réfère pas à la règlementation de son département et le fermier accepte purement et simplement ce prix.
Sachez que la règle des minima et des maxima est une règle d’ordre public et que les parties sont obligées de la respecter. Si le montant du fermage ne respecte pas la règlementation, le code rural prévoit la possibilité de l’action en révision des fermages anormaux (art. L. 411-13). Cette action s’exerce devant le tribunal paritaire des baux ruraux et certaines conditions doivent être réunies :
- il faut que le prix stipulé dans le bail soit supérieur ou inférieur d’au moins un dixième à « la valeur locative de la catégorie du bien particulier donné à bail ». Ceci ne doit pas être compris de façon trop stricte. En effet, la cour de cassation estime que le prix convenu est normal s’il s’inscrit dans le cadre des maxima et minima prévus par l’arrêté préfectoral. Donc concrètement, l’action en révision aboutira essentiellement dans les cas de dépassement des valeurs fixées par la règlementation départementale ;
- l’action doit être intentée au cours de la troisième année de jouissance et elle n’est possible qu’une seule fois pour chaque bail.
Il est aussi utile de savoir que la révision du prix n’est pas rétroactive. C’est-à-dire que le nouveau prix ne s’applique qu’à la période du bail restant à courir à compter de la date de la demande.
L’action en révision des fermages anormaux doit être une solution de dernier recours. La relation entre le bailleur et le fermier est, à la base, une relation de confiance. Dans la mesure où il s’agit souvent d’une relation à long terme et que chacun cherche à y gagner quelque chose, il n’est pas conseillé d’engager une procédure judiciaire si cela n’est pas absolument nécessaire. Il est préférable d’en discuter avec le propriétaire et d’essayer de lui faire comprendre par le biais de la règlementation que son fermage ne correspond pas à la valeur réelle. Si toutefois le fermage est très fortement supérieur à la règlementation et met ainsi en péril le fonctionnement de l’exploitation, l’action en révision peut être une solution pour sauver la rentabilité d’une exploitation.