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VITICULTURE

Le groupe Jaillance en conquête de nouveaux consommateurs

La cave de Die Jaillance a tenu son assemblée générale le 25 avril. Si les résultats de l’année 2023 n’ont pas atteint les objectifs, ses dirigeants espèrent avoir posé « les fondations nécessaires » pour retrouver de la croissance dès cette année.

Le groupe Jaillance en conquête de nouveaux consommateurs
Jay’up, nouveauté en clairette de Die, et Bulles de Break, vin pétillant à la pression, cassent les codes traditionnels et visent les consommateurs de moins de 35 ans. ©S.S.-AD26.

Être « hyper déterminés, combatifs pour aller chercher de la croissance », c’est le leitmotiv de Guillaume de Laforcade, directeur général du groupe Jaillance depuis dix-huit mois. Malgré les efforts fournis en 2023 à tous les échelons de l’entreprise, l’objectif de croissance du chiffre d’affaires n’a pas été atteint. Les vins de Jaillance, notamment la Clairette de Die, ont subi de plein fouet l’inflation galopante. « Une inflation inédite qui a forcément eu des effets sur la consommation. Les consommateurs ont arbitré et la clairette ne fait pas encore partie des achats de première nécessité », a résumé le directeur. D’autres difficultés ont également marqué l’année 2023, a rappelé le président Oliver Rey, affectant aussi le résultat de l’exercice. Il a pointé du doigt l’explosion des frais financiers, multipliés par trois entre 2022 et 2023, l’inflation sur le coût des matières sèches (verrerie notamment), de l’énergie… « Ces coûts ne sont pas répercutables sur nos prix de vente. En tout cas, pas dans l’immédiat. Ce qui a pour conséquence d’affaiblir notre capacité financière et de nous mettre en difficulté sur le développement souhaité en limitant nos moyens pour le marketing et la communication », a déclaré le président. 

Forte progression en MDD

À 31 millions d’euros, le chiffre d’affaires 2023 est toutefois resté stable par rapport à 2022. Toutes activités confondues (incluant celle de la cave de Die et des autres entités du groupe, notamment la cave Brouette en crémant de Bordeaux), le nombre de cols commercialisés est de 9,284 millions soit 2 % de plus qu’en 2022. Avec 4,852 millions (M) de cols, la Clairette de Die tradition enregistre un recul de 4 % par rapport à 2022 mais avec une forte progression en marques de distributeurs (MDD), à + 13,9 %, soit un total de 1,263 M de cols vendus sous MDD. À noter aussi une progression de la clairette brut (454 000 cols, soit + 20,3%) mais un fort recul en clairette bio (- 17 % soit au total 639 000 cols).

Le crémant de Die, quant à lui, s’est révélé stable à 79 000 cols « avec un objectif pour 2024, de faire accélérer sa consommation », car le marché est porteur sur les autres crémants en France, a souligné Guillaume de Laforcade.

Il a assuré qu’en 2024, les collaborateurs garderaient le cap fixé par le conseil d’administration, avec une priorité : créer plus de valeur et qu’elle puisse contribuer au revenu des viticulteurs. Le président, Olivier Rey, l’a réaffirmé : il faut une augmentation des ventes et du chiffre d’affaires. « La valeur de la récolte des vignerons s’est dégradée de plus de 30 % depuis les vendanges de 2018, a-t-il rappelé. Les années se suivent et se ressemblent malheureusement dans un contexte, en France et ailleurs, de déconsommation des vins. » La priorité est donc de gagner de nouveaux consommateurs, quitte à casser les codes de la clairette de Die classique.

Jay’Up et Bulles de Break cassent les codes

C’est l’ambition de la cuvée Jay’Up, une clairette de Die en déclinaison brut et doux, qui adopte un visuel plus proche du pop art que des traditionnels dorures et blason. Géraldine Derycke, directrice marketing et communication de la cave, a présenté ce nouveau produit, destiné aux circuits spécialisés. Objectif : séduire les consommateurs de moins de 35 ans, notamment au travers de la mixologie et propulser la clairette de Die en base incontournable de cocktails sur un marché où le prosecco italien excelle.

Sans oublier un autre concept qui, lui aussi, casse totalement les codes : le vin à la pression Bulles de break, à base de muscat et clairette. Disponible depuis peu pour les cafés, restaurants, Bulles de Break est conditionné en fûts de 20 litres. Il se positionne ainsi sur un nouveau créneau et vise à grignoter des parts de marché à la bière, là aussi auprès d’un public jeune. Jaillance compte aussi sur Bulles de Break pour conquérir le marché de l’événementiel (festivals, évènements sportifs, fêtes locales…).

Pour aller chercher de la croissance, Guillaume de Laforcade a annoncé une « montée en puissance » de l’équipe de commerciaux. Tous les circuits sont visés : la grande distribution, les commerces de proximité, l’export… Si tout est mis en œuvre du côté du groupe Jaillance pour retrouver une croissance durable, le président Olivier Rey a tout de même insisté sur le nécessaire accompagnement de l’État. « Le monde viticole est toujours en attente de certaines mesures conjoncturelles promises par le gouvernement et qui ne sont pour l’instant pas à la hauteur des besoins de la filière pour surmonter cette crise », a-t-il déclaré. C’est Martine Charmet, conseillère départementale, qui a clôturé cette assemblée générale, rappelant qu’en 74 ans d’existence, la coopérative avait déjà traversé des périodes difficiles et que le collectif permettrait sans nul doute aux viticulteurs de surmonter une nouvelle fois les chocs.

Sophie Sabot

Bulles de Break, vin pétillant à la pression, innovation de Jaillance. ©S.S.-AD26.
EN BREF

Le vignoble du Diois touché par le gel

Nicolas Fermond, directeur technique, a dressé un premier bilan, même s’il n’est pas encore complet des conséquences de la vague de froid entre le 19 et le 25 avril. Les vignes de la vallée de la Gervanne ont été selon lui « peu ou pas touchées » par le gel. En remontant la vallée, vers Piégros-la-Clastre, Aubenasson, Saint-Sauveur-en-Diois, les bas-fonds sont touchés. Plus haut vers Espenel, Vercheny, l’impact a été plus important avec des parcelles en plaine comme des bas-fonds qui ont subi le gel. « Les plus gros dégâts se situent entre Aix-en-Diois et Poyols où, sur certaines communes, les pertes sont évaluées à plus de 40 %. Les chiffres ne sont pas consolidés mais on peut malheureusement déjà imaginer que le potentiel de production de la cave est amputé d’une vingtaine de pourcents », a estimé Nicolas Fermond.

En chiffres

Des adhérents relativement jeunes

La coopérative Die-Jaillance compte 210 adhérents, qui représentent 182 exploitations. Le nombre d’adhérents a reculé de 4,5 % en un an. « Des départs en retraite mais pas que, a signalé Nicolas Fermond. Il y a aussi des abandons de l’atelier vigne sur certaines exploitations ». À noter, 52 % des surfaces sont entre les mains de viticulteurs de moins de 45 ans. Ainsi, en prenant en compte la tranche d’âge supérieure, ce sont 80 % des surfaces qui sont exploitées par des moins de 55 ans.

Des surfaces qui, en 2023, représentent 1 171 ha, en légère diminution après un pic de 1 191 ha en 2021. Pour mémoire, la limitation des surfaces a été actée par le conseil d’administration de la coopérative, dans la droite ligne des orientations du syndicat d’appellation.

Côté cépage, le muscat petit grain représente 79 % des 1 171 ha, contre 19 % pour la clairette. Le reste se répartissant entre de petites surfaces en gamay, syrah, pinot noir, aligoté et chardonnay. Nicolas Fermond a alerté sur le recul du cépage clairette et indiqué que la cave réfléchit à un dispositif incitatif pour l’enrayer. « Ce cépage fait partie des enjeux car [commercialement] nous voulons mettre l’accent sur le crémant de Die et la clairette brut », a-t-il souligné.