Projets énergétiques : les paramètres à prendre en compte
Centres de méthanisation et centrales photovoltaïques poursuivent leur développement sur les exploitations agricoles d’Auvergne-Rhône-Alpes. Ces projets énergétiques peuvent être une véritable opportunité pour les agriculteurs mais attention de bien examiner tous les paramètres.

En Auvergne-Rhône-Alpes, la méthanisation et le photovoltaïque séduisent de nombreux agriculteurs. Ainsi, en 2020, on comptait 55 unités de méthanisation agricole en fonctionnement dans les douze départements que compte la région. 41 unités de méthanisation agricole étaient également en cours de développement sur le territoire1. « Sur la partie photovoltaïque, on garde une croissance sur le nombre de projets engagés, à peu près au même rythme que les années précédentes », constate Enzo Casnici, conseiller énergie de la chambre d’agriculture du Rhône. « J’ai eu beaucoup d’appels cette année, notamment du fait du changement d’arrêté sur le rachat de l’électricité photovoltaïque. »
Cet arrêté, prévu pour l’été 2021, devrait permettre d’installer des bâtiments plus grands. Les démarchages des installateurs devraient donc augmenter auprès des agriculteurs. « À la chambre d’agriculture du Rhône, nous considérons qu’il est un peu risqué de se lancer dans un projet photovoltaïque avant que les textes ne soient sortis, ce qui n’empêche pas de l’étudier en attendant », ajoute le référent énergie. « En tout cas, ce type de bâtiment s’offre à beaucoup plus d’agriculteurs que ceux destinés à l’autoconsommation : entre 2017 et 2019, il y a eu une grosse recrudescence du photovoltaïque en général, mais l’autoconsommation dominait. Ce nouvel arrêté devrait changer la donne et rééquilibrer la part entre autoconsommation et vente. »
Le prix des installations a baissé
En effet, du fait du coût des installations, l’autoconsommation avec vente de surplus avait jusqu’ici le vent en poupe, les installations étant moins coûteuses que celles destinées à 100 % à la vente. « Le prix des installations photovoltaïques ayant baissé, les agriculteurs peuvent se permettre de faire de grandes centrales, l’autoconsommation est un peu moins regardée, car cette filiale a donné lieu à de nombreuses arnaques, les agriculteurs commencent à s’en méfier. » Grâce au travail de prévention des chambres d’agriculture, les pratiques frauduleuses sont mieux connues des agriculteurs, même si des démarcheurs peu scrupuleux existent toujours.
« Lorsqu’on se lance dans un projet d’autoconsommation, il faut en face une consommation importante sur l’exploitation, et cela au bon moment : les panneaux produisent l’énergie surtout en milieu de journée et en été, il faut donc qu’elle soit utilisée à ce moment-là. De mauvais conseils peuvent ainsi mener un agriculteur à se pourvoir de panneaux alors qu’il n’auto-consommera pas suffisamment sa production, et donc investir dans un dispositif sans rentabilité à la clé, car le prix de revente du kilowattheure est dérisoire. » Un risque à garder en tête pour les agriculteurs souhaitant se lancer dans la production d’énergie photovoltaïque, qui en 2015 émanait à 13 % du monde agricole sur l’ensemble du territoire français2.
Méthanisation : l’injection directe gagne en popularité
Du côté de la méthanisation, la cogénération, soit la production de gaz puis d’électricité via une génératrice, perd de la vitesse sur l’injection directe. « Les projets sont de plus en plus gros car les prix de rachat baissent, il y a donc une nécessité d’aller vers des projets plus importants, pour bénéficier de l’échelle d’investissement et rester rentable », constate Enzo Casnici. Ainsi, les projets de méthanisation développés en Aura entre 2015 et 2017 utilisaient principalement la cogénération. Ils étaient plutôt de petite taille, basés à la ferme et liés à une, deux ou trois exploitations maximum.
Ces unités de méthanisation utilisaient surtout les effluents agricoles. « C’était la base de la méthanisation depuis 2010 : aujourd’hui ce modèle a quasiment disparu, pour être remplacé par de très gros projets en injection de gaz directe. » Avec ces grandes unités, de nouveaux déchets sont valorisés, notamment les biodéchets. Quant à la durée des projets, elle est très variable. « Fondamentalement, un projet de méthanisation peut se développer en deux ou trois ans, de la première réflexion à la mise en service avec un bon accompagnement. Trois ans est l’optimum, mais nous avons des porteurs de projets pour qui cela prend 10 ans. Ce sont de beaux projets, mais leur mise en place est très longue et chronophage », conclut Enzo Casnici.
Zoé Besle
1. Chiffres Aura-EE, 2020.
2. Ademe, chiffres 2015.
Photovoltaïque versus méthanisation : quel investissement ?

Le temps d’installation comme le coût de l’investissement sont nettement moins élevés pour le photovoltaïque : comptez entre 20 000 et 40 000 € pour des centrales d’autoconsommation dont la puissance est comprise entre 15 et 30 kilowatt-crête (kWc) (de 90 à 180 m² de surface). Les centrales de 100 kWc (environ 600 m²), elles, chiffrent plutôt dans les 75-90 000 €.
Pour un projet de méthanisation, l’augmentation d’échelle des centrales a aussi un impact sur leur coût : le prix des projets dépasse en général les 3 à 4 M€, contre 1 à 2 M€ jusqu’à fin 2018. « Le photovoltaïque s’adresse à tout le monde, quand la méthanisation est plutôt pour des exploitations de taille importante ou du collectif », résume Enzo Casnici.