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Droit rural

Transmission : comment sortir de l’indivision ?

La règlementation au sujet de l’indivision prévoit de nombreuses exceptions.
Transmission : comment sortir  de l’indivision ?

Question : Suite à un héritage, je suis devenu propriétaire, avec mes frères et sœurs, de plusieurs parcelles de terres agricoles et de l'ancien corps de ferme. Un de mes frères souhaite donner l'exploitation à un copain agriculteur mais on n'arrive pas à se mettre tous d'accord. Cette situation dure depuis tellement longtemps que j'ai bien peur qu'aucune solution n'émerge. J'ai entendu dire que l'on pouvait sortir de l'indivision. Comment faut-il procéder ?

 

Réponse : Vous avez entendu juste. En effet, la loi dit que « nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention. » (article 815 du code civil). Ainsi, l'indivision est une situation dite provisoire. Comme vous pouvez le constater, la portée de cette règle de partage n'est pas absolue. En réalité, il existe de nombreuses exceptions dont voici quelques illustrations :
• les indivisaires peuvent convenir de suspendre le partage. En cas d'accord entre tous les indivisaires, ceux-ci peuvent conclure une convention qui sera soumise aux règles des articles 1873-1 à 1873-18 du code civil et qui organise le fonctionnement de l'indivision et l'exercice des droits de chacun ;
• le maintien dans l'indivision peut être imposé par le juge. Chaque indivisaire peut saisir le tribunal de grande instance s'il estime, soit que le partage immédiat risque de porter atteinte à la valeur des biens indivis, soit qu'il souhaite faire valoir une reprise de l'exploitation ou la société ;
• certains biens sont en indivision dite forcée et perpétuelle en raison de leur nature (clôtures mitoyennes, parties du sol communes à l'usage de plusieurs immeubles...).

Dans votre cas, il faut aussi tenir compte de l'article 824 du code civil :
« Si des indivisaires entendent demeurer dans l'indivision, le tribunal peut, à la demande de l'un ou plusieurs d'entre eux, en fonction des intérêts en présence et sans préjudice de l'application des articles 831 à 832-3, attribuer sa part à celui qui a demandé le partage. S'il n'existe pas dans l'indivision une somme suffisante, le complément est versé par ceux des indivisaires qui ont concouru à la demande, sans préjudice de la possibilité pour les autres indivisaires d'y participer, s'ils en expriment la volonté. La part de chacun dans l'indivision est augmentée à proportion de son versement. » Donc si vos frères et sœurs ne souhaitent pas procéder au partage, ils ont la possibilité de le faire savoir au tribunal et de vous racheter en quelque sorte votre part.

Vous pouvez constater que la règlementation au sujet de l'indivision prévoit de nombreuses exceptions afin de tenir compte de toutes les éventualités. Toutefois, pour les procédures au tribunal, il faut compter environ une année pour aboutir à une demande de partage. Et encore, si les indivisaires ne trouvent pas d'accord entre eux quant à la valeur du bien ou à la destination du bien, la procédure est souvent bien plus compliquée et entraîne des demandes réciproques avec de longs délais d'instruction. Vu la complexité, le recours à un avocat est inévitable et les frais que peuvent engendrer la procédure judiciaire (expertise de la valeur, contre-expertise, etc.) peuvent rapidement dépasser la valeur d'un bien agricole.
Le partage ou la sortie d'un indivisaire de l'indivision doit ainsi être mûrement réfléchi et une négociation avec les co-indivisaires est plus que conseillée. Le partage judiciaire d'un bien indivis devra représenter le dernier recours. 

Le service juridique rural
de la FDSEA 26,
Nathalie Kotomski