Travailler en collectif, un choix déterminant
Travailler en collectif comporte des étapes, des aléas et des échéances. Cette démarche a été initiée au sein du Gaec La ferme des Buis, à La Roche-sur-Grane.

L’installation d’activités agricoles et la transmission des fermes sont un enjeu important dans les territoires ruraux. Aussi, les associations du réseau Inpact 26, dont font partie l’Afog 26-07 (association de formation collective à la comptabilité et à la gestion) et Solidarité Paysans Drôme-Ardèche (association d’accompagnement des agriculteurs en difficultés), ont organisé une ferme ouverte, dernièrement au Gaec Ferme du Buis (maraîchage et arboriculture) à La Roche-sur-Grane. Thème de la rencontre : s’installer à plusieurs ou le défi du collectif. Les deux associés, Corentin Moriceau et Tom Galodé, ont expliqué aux porteurs de projets leurs parcours d’installation, le passage de l’entreprise individuelle en Gaec, leurs moments de difficultés, leur évolution au sein du collectif. « C’est un choix mûri. J’avais développé une activité collective avec des copains en Savoie puis dans une ferme en Chartreuse en 2016, a raconté Corentin Moriceau. L’idée de travailler à plusieurs m’intéressait car je ne voulais pas supporter une charge de travail trop forte. J’avais en mémoire mon père qui s’était épuisé à la tâche, faisant un burn out à l’âge de 50 ans. »
Arrivée d’un associé sur un modèle existant
Corentin Moriceau s’est lancé dans le maraîchage bio en 2017. Comme il travaillait seul, il a présenté un projet à la banque. Après avoir publié une annonce pour chercher un salarié, et à terme un associé, il a rencontré Thibaut, lequel a travaillé avec lui pendant trois années. Pendant cette période de test, il y a eu des divergences de vues sur l’accueil à la ferme, les protocoles de récolte, de cueillette. Thibaut s’est retiré et Corentin s’est retrouvé seul à gérer un verger de 2,5 ha et des parcelles de maraîchage de 0,5 ha. « J’avais beaucoup de travail. J’ai embauché des salariés pendant une année » a-t-il expliqué. Tom Galodé est venu faire un stage ainsi que Valentin et Audrey. « Nous avions trouvé un bon rythme et je voulais reprendre la démarche collective initiée en Chartreuse. » Tom s’est intégré facilement dans la démarche de Corentin. « Je suis arrivé sur un modèle existant qui me convenait », soutient-il, souhaitant avoir du temps libre. Il n’est pas issu du monde agricole, a un cursus de sportif et a suivi de nombreux stages en permaculture et dans une châtaigneraie. Tom Galodé bénéficie d’un stage test installation transmission (Stit) financé par la Région Auvergne-Rhône-Alpes. Corentin et Tom définissent des priorités, se répartissent progressivement les tâches et accompagnent les transitions. Les deux partenaires privilégient la communication. Et cherchent à dénouer les problèmes à la racine.
Répartition des tâches et pôles de responsabilité
Corentin et Tom créent le Gaec et s’associent en 2023. La ferme Les jardins du Buis comprend deux autres personnes en stage Stit et une salariée, Audrey. L’expérience du collectif crée certes des aléas mais permet de gagner en compétences pour les deux associés et les stagiaires. « La période de transition, d’être seul puis en collectif, nécessite de se décharger mentalement, de gagner en calme, d’avoir une vie privée plus équilibrée. Le côté progressif est déterminant. J’ai beaucoup délégué en tâches. Le pouvoir s’est réparti progressivement. Nous arrivons à des décisions unanimes », relève Corentin Moriceau. Les deux associés ont été accompagnés dans leurs démarches par l’Afog et Solidarité Paysans. Aujourd’hui, le Gaec produit plus de chiffre d’affaires avec moins de temps de travail sur l’exploitation. « On anticipe mieux, on a gagné en efficacité sur la gestion de l’exploitation et sur les ventes en direct dans les marchés locaux, conclut Corentin Moriceau. Nous avons des pôles de responsabilité mais les gros travaux sont réalisés en commun. »
Pierre-Louis Berger
Le maraîchage et l’arboriculture, en bio, sont les deux pôles d’activités de la ferme avec 1 500 arbres fruitiers (cerisiers, figuiers, pommiers, poiriers), sur deux hectares. ©PLB-AD26