Troupéou prend le pari de l’investissement
Pour rester dans les normes, l’entreprise de découpe Troupéou basée à Mornans, doit investir dans une nouvelle installation de réfrigérants avant 2030.

Deux années de questionnements importants pour Morgane Cadario. La gérante et créatrice de Troupéou, entreprise spécialisée en découpe de viandes à Mornans, doit faire face à un nouveau défi. Elle a profité de la visite de Thierry Devimeux, préfet de la Drôme, de Frédéric Regnier, président de la chambre de métiers et de l’artisanat (CMA), et d’autres élus¹, pour partager son appréhension. L’ombre au tableau : l’interdiction du R404. L’utilisation de ce fluide frigorigène, ciblé en raison de sa forte émission de CO2, est régulée par le règlement européen F-Gaz 2024/573². Ainsi, depuis 2020, la commercialisation des appareils de réfrigération neuf chargés en R404A est interdite. Toutefois, son utilisation restait possible s’il était régénéré et bien étiqueté ou s’il était récupéré dans des équipements². En 2030, fin des dérogations.
De lourds investissements
Lors de la création de Troupéou, Morgane Cadario avait emprunté 300 000 €, épaulée par son compagnon Rémy Mathon, éleveur à la ferme Spittel Mathon. Un prêt qu’elle devrait amortir d’ici 2027. Alors que la lumière au bout du tunnel semblait se rapprocher, un nouvel investissement s’impose. Pour changer l’installation réfrigérante, Troupéou devra débourser 250 000 €. De quoi faire réfléchir la gérante de 39 ans. « On a pris le pari de l’investissement mais on compte sur les aides du Département, annonce-t-elle au préfet. Nous souhaitons aussi développer la partie commerciale de la structure ».
Entre 100 et 150 producteurs par an transforment leur viande chez Troupéou. Ils se situent dans un périmètre de 70 km autour de Mornans, essentiellement des Drômois et des Ardéchois. Les éleveurs envoient leurs bêtes aux abattoirs de Die, de Romans, Saint-Auban-sur-l'Ouvèze ou d’Aubenas avant que les carcasses n’arrivent chez Troupéou pour être découpées, transformées et emballées. Chaque année, près de cent tonnes de viandes entrent dans les ateliers de Mornans, dont une majorité de porcs et de bovins.
Développer le commerce
À première vue, la conjoncture actuelle ne semble pas toucher l’entreprise qui n’a observé, durant neuf ans, « que de la croissance ». La preuve qu’elle répond bien à une demande des éleveurs « surtout ceux situés à dix kilomètres à la ronde car nous sommes un bassin d’élevage », rappelle la cheffe d’entreprise. D’ailleurs, 30 % du chiffre d’affaires se fait sur place, avec la vente des produits transformés dans la boutique, chose que n’avait pas anticipée Morgane Cadario à la création.
Environ cinquante cinq tonnes de produits finis sortent de l’atelier chaque année. ©ME-AD26
Toutefois, depuis l’après-Covid, la hausse du coût des matières premières et de l’énergie n’ont pas épargné Troupéou. « Tout a augmenté », déplore Morgane Cadario qui espère voir la croissance de l’entreprise repartir. Pas question de se reposer sur ses acquis, la gérante projette de relancer la machine grâce à la commercialisation. Elle peut compter sur des collectivités de tout le département qui, depuis la rentrée, se fournissent auprès de Troupéou pour alimenter des collèges et des lycées.
¹ D’autres élus, tel que Baptiste Arnoux, secrétaire général de la sous-préfecture de Die, étaient présents. Cette visite a été organisée dans le cadre des rencontres des artisans par la CMA afin de valoriser le savoir-faire local.
² Règlement (UE) 2024/573 du Parlement européen et du Conseil européen du 7 février 2024 relatif aux gaz à effet de serre fluorés, modifiant la directive (UE) 2019/1937 et abrogeant le règlement (UE) 517/2014.
M.E
Une nouvelle ferme
Depuis septembre 2023, Morgane Cadario est redevenue éleveuse en parallèle de Troupéou. Elle est à la tête d’un troupeau de 40 bovins allaitants à Vesc. Sa ferme est autosuffisante : système pâturant et fourrage produit sur place. Pour l’instant, l’agricultrice est aidée par son conjoint pour la conduite des cultures. Elle produit du bœuf et du veau rosé des montages de la Drôme¹. « Je reviens à mon envie de jeunesse : aller passer du temps avec mes vaches dans les champs », confie l’éleveuse.