ZFE : un casse-tête pour les livraisons
La mise en place de zones à faibles émissions (ZFE) crée des difficultés pour les producteurs livrant dans les métropoles concernées. Si des dérogations existent, les restrictions progressives, doublées d’aides, poussent à s’équiper de véhicules moins polluants ou à inventer d’autres solutions.

Alors que d’ici 2025, 43 agglomérations françaises devront mettre en place une zone à faible émission (ZFE), 11 métropoles en ont déjà instauré une. La région Auvergne-Rhône-Alpes n’est pas épargnée puisqu’elle en compte déjà trois : la Métropole de Lyon, celle de Grenoble ainsi que celle de Saint-Étienne.
Des mises en place progressives
Chacune d’entre elles n’a pas le même niveau de restriction. Mise en place dès 2020, la ZFE de Lyon interdit actuellement aux particuliers de circuler avec une vignette Crit’air 5 et non classés mais également aux poids lourds et véhicules utilitaires légers classés Crit’Air 5, 4 et 3 ou non classés. Avec des échéances progressives, les élus annoncent qu’au 1er janvier 2024, tout véhicule au-delà de Crit’air 4 sera interdit puis à l’échéance de 2028, les Crit’air 2 et au-delà seront concernés.
Grenoble-Alpes Métropole a également un calendrier graduel de restrictions. Actuellement, les véhicules utilitaires légers et poids lourds Crit’Air 3, 4 et 5 sont interdits. Puis, à partir du 1er juillet 2023, ce sera au tour des véhicules particuliers classés Crit’Air 5.
Quant à Saint-Étienne Métropole, elle a choisi de ne limiter la circulation qu’aux poids lourds et véhicules utilitaires. Et à l’heure actuelle, seuls les véhicules non-classés sont concernés.
Des aides et dérogations
Difficile de s’y retrouver, d’autant que plusieurs ZFE comportent des dérogations. Ainsi, à Lyon, les véhicules frigorifiques peuvent obtenir une dérogation de trois ans sur demande. Tout comme les véhicules d’approvisionnement des marchés, Amap et circuits courts, qui ont jusqu’au 31 décembre 2023 pour demander une dérogation individuelle de maximum un an. « Et a priori, il n’y en aura pas d’autres à l’avenir », révèle Axelle Verniol, conseillère en stratégie commerciale et en circuits de proximité à la chambre d’agriculture du Rhône. Dans la ZFE de Grenoble également, « des dérogations peuvent être accordées pour une durée de trois ans aux véhicules d’approvisionnement en circuit court pour les agriculteurs titulaires d’une carte MSA », indique la responsable de la direction transition énergétique de la métropole, Hélène Poimboeuf. Les deux collectivités ont par ailleurs mis en place des aides spécifiques pour aider les professionnels à s’équiper de véhicules de livraison moins polluants. Mais elles s’adressent toutefois aux habitants des métropoles (ou de territoires partenaires).
Les agriculteurs peu informés
La chambre d’agriculture du Rhône a mené entre novembre 2022 et février 2023 une enquête auprès de producteurs en vente directe ou en circuits courts. « Il en ressort que beaucoup d’agriculteurs ne sont pas au courant. La première problématique est de les informer ». Ainsi, 40 % des répondants ne connaissent pas leur vignette Crit’Air. Même constat à Grenoble, où « la chambre d’agriculture s’est engagée à faire de la communication auprès des agriculteurs », révèle Mélanie Hovan, conseillère à la chambre d’agriculture de l’Isère.
En plus de cette ambition informative, la chambre d’agriculture du Rhône a entamé une recherche de solutions. Ainsi, en 2022, une expérimentation a été lancée entre le territoire du Beaujolais et la ZFE de Lyon. Appelée Beaujo’Lyon, elle a permis de tester la livraison par voie douce : en péniche depuis le port de Villefranche et le 9e arrondissement de Lyon, puis des vélos-cargo ou véhicules utilitaires légers électriques pour les derniers kilomètres. « En 2023, nous avons pour objectif de pérenniser un mode de livraison doux entre le Beaujolais et Lyon, explique Axelle Verniol. Nous menons également une réflexion autour d’un axe de mise en commun de livraisons ou de recours à des prestataires pour diminuer les coûts, couplé à un outil digital qui faciliterait la commande d’un transport et permettrait une traçabilité. Mais cela demandera de changer les manières de travailler des agriculteurs ».